Les années 90, vous vous rappelez ? C'était déjà quelque chose en soi, mais pour le petit milieu du jeu de rôles, ça a laissé des traces. C'était la Grande Epoque, celle du Casus Belli mensuel, des best-sellers français à 10.000 exemplaires, des 20 nouveautés par mois, de Mireille Dumas, de Vampire : la Mascarade, de Magic...
En cette époque troublée, les jeux se devaient d'être GRIMDARK* : quel que soit leur genre, il faillait être vaguement goth et très très méchant, même si on se voulait pas trop sérieux. Rifts, Deadlands, le Monde des Ténèbres, SLA Industries, Underground, Blood of Heroes, HöL et j'en passe.
C'était bien quand même.
Et vous savez quoi ? Vingt ans plus tard, comme une horloge, frappe la nostalgie. Et des gamers de ma génération y succombent par pelletée. Notamment Logan Bonner**, l'auteur du merveilleux Refuge In Audacity: EXTREME Role-Playing in the Galactic Super-City!
Audacity est une ville qui couvre toute une galaxie, dernier refuge de l'humanité après La Catastrophe des Guerres Nucléaires Interstellaires. Humanité qui s'est relevée tel un soleil levant et, grâce à la maîtrise de la cybernétique et de l'électrosynthèse, est aujourd'hui tellement sensass' qu'elle se compose de cyborgs, de robots, de monstres et de lézards tueurs.
Les PJ, eux, sont encore plus sensass'. Sensass' à quel point ? Au point de compter leurs points d'XP par tranche de 100.000, d'avoir un multiplicateur de dégâts de x1.500, d'être invulnérable à la mort et aux MST, de pouvoir respirer dans l'espace et de terminer chaque combat par l'anéantissement du monde où ils se trouvent.
RiA est une œuvre d'art. Jetez un œil à la feuille de personnage — pardon, le formulaire comptable d'enregistrement de personnage. Regardez la bande supérieure. Rendez-vous compte qu'elle contient la case "nombre de dents".
En 36 pages, Bonner a réussi à condenser tout ce qu'il y avait à sauver de cette époque : son sens de la démesure, son énergie hormonale la plus pure, son innocence faussement parée d'un cynisme de pacotille, et son absence totale de peur du ridicule. Et des crânes. Des tonnes de crânes. J'en pleure de jalousie.
Quelques passages choisis pour vous convaincre de la valeur culturelle intrinsèque de ce jeu :
A propos de la TechnoEglise
"L'ÜberPape en est le responsable, mais il est très vieux. Donc tous les Ultima-Evèques veulent prendre sa place et sont super politiques les uns avec les autres."
A propos des cyberdollars
"Les pièces de cyberdollars contiennent toutes une puce cybermatrixe pour les rendre plus digitales."
A propos de Cribnos, la planète-fétus-vampire
"A l'origine, Cribnos la Créature était simplement un fétus extra-alien géant flottant dans l'espace. Mais Daimianos Xylex le Vampire l'a mordu et transformé en fétus démon vampire de l'espace. (...) Cribnos a la taille d'une lune, et sa peau de bébé vampire est couverte de monstres vampires qu'il a mordus."
Conseil de maîtrise
"Vous pouvez démarrer une scène sur un combat, ou les PJ peuvent faire d'autres trucs d'abord. Est-ce qu'il y a des gens à qui parler ? Des trucs à acheter ? Après tout, c'est plus important que le combat. Vous pouvez leur donner des points d'XP pour ça, également, au lieu de leur en distribuer pour les combats. Mais seulement si le joueur fait du bon roleplay ou un très bon jet de dés."
Qu'est-ce que je vous avais dit ? De l'art.
Refuge In Audacity est un jeu publié par Critical Hits sous licence Creative Commons (attribution, non-commercial, share-alike) et disponible gratuitement en PDF à cette adresse. Vous pouvez également vous procurer une version papier sur leur page Lulu.
*De grim : sinistre et dark : ténébreux. Il fait très très noir, en gros. Plus sérieusement : quand la ténébritude dépasse les limites acceptables et devient source d'hilarité malgré un sérieux imperturbable. Généralement avec des crânes, des piques et des chaînes. Voir : Warhammer 40.000 ou Loup-Garou : l'Apocalypse.
*Il se pourrait qu'il s'agisse d'un pseudonyme.

:)
RépondreSupprimerQuestion JDR, c'est surtout le début des 90's les "derniers feux de l'age d'or", le zenith, le climax ... .Tout le monde veut faire du "jeu de role", et beaucoup de jeux de figurines en sont estampillés, dans la lignée de héroquest (j'en ai un de Tomy !)
En meme temps l'arrivée de la Mascarade renforce l'aspect "gothique croix à l'envers"
C'est aussi les temps des grandes fissures, Dumas & magic en tête, mais aussi l'épuisement générationnel : la grande masse des joueurs 80's collège-lycée, qui a alimenté le marché, commence à s'évaporer (copine, fac, boulot, dispersion des amis, changement de sociabilité)
Vers le milieu des années 90, internet et les PC sont prets à gouverner le monde. Dans un clin d'oeil, les MMOPRG seront la et une partie des groupes rolistes restants les investiront.
Casus, apres 93, bas déja de l'aile, et toutes les autres revues ont pratiquement disparu. Magic regne sur les ados et les Colons de catane se vendent comme des petits pains, annonçant la vague eurogames et la démocratisation des JDP.
Bon, c'est comme je le vois, mais je suis legerement plus vieux...et j'ai vécu ça autrement.
À quand la VF !
RépondreSupprimerJ'y pense très très fort, mais genre quand j'aurai du temps. C'est-à-dire approximativement dans 3 cycles galactiques.
SupprimerY a un truc incroyable que Donj'(3e ed. surtout) m'a appris ... c,est qu'on peut se multiclasser. je laisse les paladins loyals (wouch!) bons dans leur croisade contre les MMORPG /JV / internet. Mois j'ai encore quelques leves avant d,atteindre la classe de prestige "uber geek" (roliste 3, gamer 3, nerd 4, animefan 3, race prérequise: troll)
RépondreSupprimerman what
Supprimernan rien. Pour revenir sur le sujet, je crois que je suis pas mal revenu de cette époque. C’est celle ou j'ai commencé le JDR et je sais qu'il y a certains trucs que je peux plus supporter: les background encyclopédiques, les règles qui se veulent universelles et exhaustives, et l’intégration système / thème indigente.
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