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jeudi 13 novembre 2014

Tous dans le minivan

Imrryran, t'es chié : je préparais un billet sur le même truc que le tien. Tant pis. Je vais faire plus gros que toi alors ! Au moins deux billets ! Voilà ! Je vais commencer par râler cette semaine, et puis la semaine prochaine j'essaie d'être constructif. Bref.

Quelque chose m'a particulièrement sauté à la tronche lors de ma dernière partie de La Guerre des Étoiles : Aux Confins de l'Empire au demeurant fort sympathique. On était six PJ. Six. Et des variés : qui chasseur de prime, qui contrebandier, qui arnaqueur, etc. On avait chacun nos contacts et nos sphères d'influence. Et fatalement y'avait une enquête avec une chaîne d'indices parce que scénario d'intro. Et cette chaîne d'indices, à un moment, se divise en trois.

Trois pistes, avec trois endroits différents où se trouvent trois contacts distincts, chacun en lien direct avec un ou deux personnages-joueurs. L'enjeu : rattraper à temps un dangereux fuyard. Pas droit à l'erreur, quoi. Course contre la montre. Chaque seconde compte. Vous voyez donc d'ici ce qu'on a fait.

On les a visité successivement, à six, en rang serré. 

Pourquoi ? Parce qu'on ne sépare jamais les PJ.

Tous dans le minivan !

Alors j'en connais qui font plein des gestes avec les mains à propos à leur vraisemblance ou leur suspension volontaire d'incrédulité ou quoi à chaque fois que, je sais pas, un réservoir d'essence explose avec une balle, une femme porte une armure décente ou un barbare survit à une chute de six cents mètres. Perso, ma suspension d'incrédulité, elle s'en mange une en pleine mâchoire chaque fois qu'on monte tous dans le minivan.

C'est une expression à moi. Que j'utilise tout haut à la table. Avec un entrain particulièrement feint. Pour souligner l'absurdité de la chose à chaque fois que ça se produit. 

Un cousin éloigné du notaire du groupe demande de le voir pour lui avouer un truc ? Urgence familiale ! Allez hop : tout le monde en route, on va prendre le thé à sept. Tu l'as déjà vu mon cousin ? Non, pourquoi ? Osef. Tous dans le minvan !

Il faut négocier subtilement un accord avec le don de la mafia locale ? On pourrait envoyer juste le négociateur du groupe mais sait-on jamais, on pourrait avoir besoin des autres. Allez tous dans le minivan !

Il faut s'infiltrer dans la corpo pour pirater un serveur ? Et si on envoyait juste le cambrioleur et le hackeur ? T'es fou, et si jamais on donne l'alarme et qu'il faut bourriner ? Tous dans le putain de minivan !

Au bout d'un temps c'est plus un récit lovecraftien, ou un thriller policier, ou de l'action-espionnage qu'on est en train de vivre, là.

C'est un épisode de Scooby-Doo.

Et encore ! Même dans Scooby-Doo le groupe se sépare des fois. Même dans Scooby-Doo. Pensez-y. Même dans un épisode de Scooby-Doo.

Alors que toutes les fictions dont on s'inspire séparent sans arrêt leurs protagonistes sans que ça pose problème. Même les trucs de Joss Whedon qui racontent pourtant les histoires les plus rôlistes du monde. Je veux dire, sa marque de fabrique c'est des héros surcompétents et sexycools, en groupe de cinq ou six, qui se comportent comme des ados attardés en balançant des bons mots. Si c'est pas toutes les tables de gidéaire de ma jeunesse je sais pas ce que c'est.

Et je parle juste des structures narratives classiques en gidéaire, hein, même pas du reste quasi infini des histoires intéressantes à raconter ! Des trucs que l'adage "sépare jamais les bonhommes" rend non plus ridicule mais purement et simplement impossible, comme les roshomons, les PvP, les heists, les histoires de confiance et de trahisons... Toutes ces situations achement intéressantes à explorer qui demandent de séparer les protagonistes pour avoir quelque chose à raconter.

Alors pourquoi on le fait

Déjà parce que tout le monde le répète. Sérieux. "Ne pas séparer le groupe" c'est devenu un putain de proverbe dans le petit monde de la rôlerie internationale. Ne jamais sous-estimer la force de l'habitude et des proverbes, surtout dans un milieu qui apprécie particulièrement la transmission orale*. 

Mais on est pas non plus des crétins bavants et j'imagine trois grosses tendances qui font qu'on hésite à séparer les PJ : on est plus fort en bande, ça maintient l'attention de tout le monde, et c'est plus facile à gérer, niveau temps et espace, pour le MJ.

On est plus fort en bande 

Le tout premier jeu de rôles du monde parle d'une bande de pouilleux explorant des souterrains peu accueillants, un des best-sellers a commencé sa carrière comme un simulateur de maison hantée, et en gros l'idée d'un groupe qui en chie pour survivre dans un milieu hostile, entre slasher movie et survival horror, est un peu inévitable dans le monde du jeu de rôles. 

Or qui n'a pas hurlé aux protagonistes intellectuellement défavorisés d'un Vendredi 13 quelconque de ne PAS, absolument PAS se séparer du groupe en glissant un "je reviens tout de suite" involontairement ironique ?

Donc ouaip no prob', je comprends le réflexe quand on explore un donjon ou une maison hantée, limite. Limite hein.

Mais est-ce qu'on ne joue qu'à des trucs du genre ?

Nos bonhommes à La Guerre des Etoiles ne sont pas des brêles, déjà. Ensuite, le seul moment où on était un brin dans le mood "un dangereux danger nous hante dans l'ombre de couloirs sombres mal éclairés" c'était la fin du scénario.

Où on s'est divisé en deux groupes sans que personne ne moufte.**

Pourquoi le réflexe du minivan pendant l'enquête alors ?

L'attention des joueurs

Si un personnage n'est pas dans une scène, le joueur n'en a rien à foutre de la scène, pas vrai ? Il va forcément décrocher. C'est normal.

Oui, moi aussi j'y ai longtemps cru. Mais déballons un peu cette idée. Ca voudrait dire que la seule chose qui intéresse chaque joueur dans cette histoire qui est, je rappelle, collective - dans tous les sens du terme : non seulement elle concerne plusieurs personnages principaux par essence mais en sus, elle est racontée à plusieurs - la seule qui les intéresse, donc, c'est ce qui arrive à leur bonhomme et rien d'autre ?

Je sais pas vous, mais mes parties mémorables le sont parce que personne décroche : parce qu'on est à fond dedans, qu'on s'intéresse à ce qui se passe, y compris pour les autres personnages principaux. Si c'est effectivement le cas, c'est peut-être autre chose que la norme. Je comprends que le pic de ton attention, le moment où tu fais le plus attention soit quand tu dois jouer ton bonhomme et que le jeu s'intéresse particulièrement à son cas, mais ça ne devrait pas être le seul moment où tu fais attention, si ?

Où je veux en venir : que les joueurs qui décrochent quand leur perso n'est pas là, je ne veux plus trouver ça normal. Je veux prendre ça comme un signal qu'il y a un souci dans la partie. Que les intrigues de chacun sont décousues, déjà. Qu'on joue un peu trop perso. Que quelque chose nous chipote et qu'en fait, on ferait bien autre chose. Et je suis vraiment pas sûr que la solution soit de pousser tout le temps tout le monde dans le minivan. 

Et quand je dis ça, je parle pas juste du MJ : jouer collaboratif, écouter les autres, réagir à ce qui se passe pour eux, rebondir sur ce qu'ils racontent, c'est un pitipeu le minimum pour un loisir qui, même en pur PvP côté personnages, est toujours un peu collaboratif pour les joueurs. 

Le temps et l'espace

Quand le groupe de PJ est bien ensemble au même endroit et au même moment, on a ce qu'on appelle les Trois Unités : de lieu, de temps et d'action. C'est pas un hasard si c'est devenu du jargon : ce genre de situation c'est hyperpratique pour raconter un truc. Une raison pas des moindres : ça empêche de s'emmêler les pinceaux au niveau de l'enchaînement des actions.


Imagine que deux PJ se séparent, l'un va à l'auberge, l'autre à l'église. Toi, le MJ, tu commences par le type qui va à l'auberge, vous jouez à la scène, puis tu passes à l'autre qui est l'église, et qui t'annonce direct "à peine arrivé, j'envoie mon page à l'auberge retrouver Machin".

Où il n'était pas. Paf, paradoxe, catastrophe, détricotage du tissu espace-temps de l'univers de jeu, les chiens dorment avec les chats, et ta partie est complètement détruite et impossible à rattraper.


Ou pas. En fait, souvent pas. En fait presque jamais. En fait, dans la vraie vie, au pire tu fais arriver le page en retard et tu lui trouves une excuse, ou tu le fais disparaître et il faut le retrouver, ou tu dis cash au joueur "euh, si t'avais envoyé le page à l'auberge, Machin l'aurait vu", ou... C'est pas les solutions qui manquent. 

Je comprends donc que cet accroc dans la toile de la narration inquiète, surtout celui qui est traditionnellement responsable pour rapiécer la susdite toile, mais cet accroc n'est ni plus fréquent ni plus difficile à repriser qu'une foultitude d'autres qui pourtant ne font baliser personne. Je pense qu'on peut péter un coup quand les joueurs t'annoncent "alors moi je fais ça pendant que lui..." au lieu de 




BREF. Maintenant que j'ai bien passé mes petits nerfs, j'avoue : quand y'a sept jours j'ai dit "du vrai du dur du concret" ? J'ai menti. Le mode d'emploi de comment faire quand les bonhommes se séparent c'est pour la semaine prochaine les boloss !

*Ce qui n'est pas sale si ça se pratique entre adultes consentants dans le respects des personnes.

**Pourquoi personne n'a moufté à ce moment-là ? SUITE AU PROCHAIN EPISODE. TUM TUM TUUUUM.

Scooby Doo, le mystery machine et à peu près tout ce qui s'y pendouille sont copyright Warner Bros - ce qui me fait espérer un éventuel cross-over au cinoche entre Batman, les quatre glandus et leur clébard.


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13 commentaires:

  1. Tiens, puisqu'on reparle de cette partie de LGdÉ:ACdE (car on pale bien de la même, n'est-ce pas ?), et tout à fait dans le sujet : est-ce que vous avez eu l'impression, côté joueurs, que je vous poussait à rester ensemble ? Parce que c'était pas vraiment mon intention, mais j'ai pu, à mon corps défendant, lancer des signaux dans ce sens, ce qui prouverait que je suis salement formaté à jouer gentiment en groupe.

    Parce que bon, quand j'ai lu le scénar, je me suis tout de suite dit : et là, forcément, j'ai trois groupes sur les bras (tu vois, je pense "sur les bras", c'est mal, je sais). C'était limite tellement clair que j'aurais pu dire quels persos allait aller à quel endroit. Puis je me suis dit qu'en fait c'était pas si génant, parce que chaque scène irait plus vite avec 2-3 PJ impliqué dedans qu'avec tout le groupe qui joue en même temps. Et que ce serait plus facile de mettre un petit groupe dans une situation embarrassante (et donc intéressante). J'avais même une ou deux fiche de PNJ simplifiée aux joueurs pas impliqués directement. Puis vous êtes restés ensemble, et j'ai sans doute trouvé ça confortable.

    Alors quoi ? j'ai communiqué par pheromones à l'insu de mon plein gré *ou bien* vous vous êtes dit : c'est une partie pour tester le jeu, on va pas faire chier le meujeu surtout qu'il a déjà pas l'air bien à l'aise, tout seul au bout de la table ?

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    1. Ah non, je pense pas que ça soit la faute à personne, en fait. Je pense qu'il s'agit de la dynamique du groupe. J'ai tenté un "ben moi et lui on va là..." et c'est tombé comme un étron sur une patinoire, donc du coup on est tous monté dans le minivan.

      Et je pense que tu as raison : c'était le mood à la table, ce soir là, "on tente le truc à la fraîche, on va suivre le scénario officiel tranquilou et prendre la tête à personne."

      Maintenant ça a pas gâché la partie, mais c'est quand même généralisé comme attitude quel que soit le jeu ou la table et je me demande pourquoi... et voilà ce que ça donne.

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  2. Rhaaa, il est où le bouton "corriger les fautes de frappe" ?

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  3. Haha! ^^
    Par chez nous on appelle ça : le syndrôme du club des 5.

    Et on n'aime pas ça non plus. Faut qu'on poste un article là-dessus aussi, d'ailleurs... n_n"

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    1. Imrryran aura lancé une vague irrépressible !

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    2. Je vais commencer à réclamer des royalties !

      Ça montre bien que le réflexe est ancré très profondément, même chez des groupes qui n'ont pas commencé par donj ou un de ses dérivés.

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    1. La Guerre des Étoiles : Aux Confins de l'Empire

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    2. Hé, Greg, je peux poster des commentaires, c'est le pied ! :D

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  5. Un truc qui va bien c'est la focale rapide sur un pj, ça permet de garder le rythme, en général je passe sur celui qui a le moins parler et qui s'endort dans son coin.
    Eh! Machin tu fais quoi? rien? Ca tombe bien Steve vient de te voir, il veut que tu trouves un moyen de le débarrasser des chinois.
    Truc? Tu tombes sur un cadavre, atrocement mutilé. Helmuth arrive alors et balances un "c'est encore un coup des chinois".
    Bidule! Tu bosses pour les chinois non?

    Et ainsi de suite sur un rythme qui va bien en faisant en sorte qu'il y ai du liant. C'est sûr faut être au taquet niveau animation mais tu peux être sûr qu'il va se passer des choses et que ceux qui ne participent pas vont sortir le popcorn en se demandant comment Truc va s'en sortir.
    Sinon avec les potes on a "contrat social": si t'es pas actif dans la scène et que tu t'en fous, tu te rends utile: chercher les bières, préparer un café, mettre les pizzas au four, etc.

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  6. En fait, ne serait-ce pas plutôt le grand rassemblement d'un groupe hétéroclite soudé de gens qui ne se connaissent pas ? Le côté minivan n'est que le moment où cela devient le plus évident. C'est pourquoi, à mon sens, la solution est à travailler sur les backgrounds des PJ (qu'ils aient vraiment une bonne raison d'être ensemble) ou les contraintes d'une situation (ils sont tous clients et employés dans une banque au moment où survient une prise d'otage, par exemple)...

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  7. ah l'effet club des 5 scoobygang dans la mystery machine...

    Ouais effectivement on a tout fait, tous ensemble. Et de fait, a toutes mes tables cela fini souvent comme ca même si on essaye parfois de séparer la bande, ca se fait rarement.

    Je pense aussi que certains (et j'en fais certainement partie) ont tendance à se dire "didju il aurait du dire/faire/demander (y a rien a biffer) cela et j'suis pas avec lui.

    On a vu ce qui se passait/disait MAIS on peut rien dire car l'autre partie du groupe oublie de le préciser ou n'en a pas tenu compte et du coup le schmilblik bloque. (non je le fais pas exprès)

    Bon j'ai un gros défaut, j'ai une grande gueule et j'suis envahissant et sur certaines tables on a des passifs qui aiment jouer mais reste quand même passifs. Mais comme on veut que tout le monde joue sa part, on les fait jouer aussi et on a parfois l'impression que tous ensemble on aurait pu faire/dire/demander mieux.

    Une sale habitude et si le MJ essaye de pousser à la séparation systématique, on fini par lui pourrir son groove. (ouais les PJ c'est tous des salopards c'est bien connu :) )

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  8. je suis
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