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jeudi 22 mars 2012

Une feuille de personnage est une liste de courses

Quand j'ai commencé à mener des parties de Feng Shui, le fameux jeu des films d'action de Hong-Kong, la sauce avait tellement bien pris qu'une partie toutes les deux semaines, c'était le strict minimum. Et on a joué pendant deux, trois ans. Autant dire qu'il m'a fallu à l'époque des trésors d'inspiration pour pondre chaque semaine des situations intéressantes autour desquelles se maraver à coups de sabres japonais, d'armes automatiques et de tessons de bouteilles. 

Depuis, j'ai usage de dire qu'une feuille de personnage, c'est la liste de course du joueur.

Si je veux jouer un gros bourrin, il aura un score de Force insolant et des compétences de combat bourrées à ras gueule. Si je veux jouer un comploteur, j'aurai un gros score en Intrigue et des tonnes de Contacts et de Ressources. Si je veux m'impliquer dans l'univers, je vais m'acheter un Rival, des Ennemis ou des Alliés, et je vais m'affilier à telle ou telle Organisation. Tout ça en achetant des attributs, des talents, des avantages et des défauts.

En ça, ma feuille de personnage représente mes envies de joueur autant que les capacités de mon personnage. Et quand on porte le chapeau du meneur, ce sont des infos utiles.

D'où l'idée de faire consciencieusement la liste des traits mécaniques les plus intéressants de ses personnages-joueurs. Voire mieux : construire son intrigue — voire sa campagne — sur cette liste. Après tout, pourquoi est-ce que j'inventerais un méchant dont je ne sais s'il intéressera les joueurs, quand ils ont eux-même choisi un Rival : Mercernaire qui ferait très bien l'affaire ? 

Voilà comment je fais.

1. On dresse la liste
Je fais une colonne par personnage. Pour chaque personnage, je liste cinq-six traits mécaniques :


  • si le jeu a des attributs, des compétences, des talents, etc. je note les deux-trois plus grosses de chaque personnages ;


  • si le jeu a des avantages et des défauts, je prends parmi les plus chers ou ceux qui m'excite le plus — il faut bien que je m'amuse aussi. Dans le meilleur des cas, le système restreint un peu le nombre de ces traits et je peux les noter tous. Sinon, j'en choisis entre trois et cinq ;


  • si le jeu propose des pouvoirs spéciaux qui ne sont ni l'un, ni l'autre, je note les plus puissants ;


  • je note aussi les possessions et les avantages hors-système, et je me force à en trouver au moins un par personnage : un vaisseau spatial à soi, une autorité sur les autres personnages, ce genre de choses.


Une fois que j'ai cette jolie liste, je regarde avant tout ceux qui sont en commun d'un personnage à l'autre et je les entoure. C'est la voie royale pour intéresser plusieurs joueurs d'un seul coup. Ensuite, je regarde ceux qui peuvent se lier l'un à l'autre. Parfois c'est évident, comme un Rival d'un personnage qui peut faire partie de l'Organisation d'un autre, ou un personnage qui peut Enquêter sur le terrain et un autre qui peut Analyser les indices que le premier trouve. Parfois c'est plus subtil, du genre un personnage arachnophobe qui fait équipe avec un sorcier qui invoque des bestioles à huit pattes. J'entoure tout ça aussi.

Si ces traits sont chiffrés, je regarde aussi les plus gros écarts d'un personnage à l'autre. Si tout le monde a Discrétion, mais qu'un joueur est meilleur que les autres, c'est intéressant. Mais si il n'y a qu'un personnage qui a Discrétion, c'est la fête : quand je vais l'amener sur le tapis, il va pouvoir briller d'autant plus.

Surtout — pendant si la création est collégiale, après si elle est individuelle — je pose des questions, plein-plein-plein. Sur comment ils voient leurs rivaux, leur phobie, l'usage "en vrai" de leurs compétences, sur comment ils vivent et avec ou par tel ou tel trait. J'ai besoin de leur vision des choses pour ne pas les trahir.

2. On refait plus de listes
Maintenant, avec la liste principale, je refais deux listes : les personnages, et les situations. 

Les personnages, c'est la liste des PNJ que je vais utiliser pendant la campagne qui sont tirés des feuilles de perso. La plupart du temps c'est évident : un Rival, un Maître, un Adversaire. Mais pas que. Si un personnage a la compétence Policier à +10, il a un supérieur ou des subordonnés. Si c'est un Professeur, il a des élèves et un recteur. Si c'est un Sorcier, il a sûrement un maître. S'il a des Phobies ou des Manies ou d'autres troubles psychologiques, il a peut-être un psychologue. Dans le doute, je demande au joueur.

Les situations, c'est le genre d'obstacles que je vais leur coller dans les pattes. Je les choisis selon leur nature — si j'ai des compétences de baston, y'a des gros bras — et leur origine — si il y a un Adversaire commun, il sera souvent derrière l'affaire.

3. On utilise tout ça
Quand je me demande "qu'est-ce qui se passe ?" — que ça soit en préparant ma séance ou pendant une partie — je regarde mes listes. Il doit y avoir suffisamment d'inspiration dessus pour me donner des idées. Les joueurs poursuivent un gars et c'est trop facile pour eux ? Pas de souci, l'Arachnophobe va tomber sur un nid d'araignées, ou l'Alpiniste va devoir grimper à la façade d'un building.

Avec cette technique toute simple, j'ai pu mener des parties avec cinq minutes de préparation et je tombais rarement à côté. Quid des vôtres ? Comment vous trouvez vos "bonnes idées" — celles que kiffent à coup sûr vos joueurs — quand le temps presse ?
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1 commentaire:

Je considère que vous avez lu la page d'avertissements et je modère en conséquence.